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parfait et sa crête égale n'était coupée d'aucune gorge. Dans la profonde plaine circulaire, des hommes grands comme des chênes se balançaient follement, parmi des clameurs.

Le cynique descendit vers ces géants et il vit avec étonnement que leurs pieds enfonçaient dans la terre. Comme quelques-uns étaient sur le bord d'un précipice, il sut que de chaque pied partaient de longues et sinueuses racines. Voyant qu'ici il y avait vraiment quelque chose de nouveau, quelque chose à comprendre, Psychodore s'arrêta en ce pays.

Malgré leur taille gigantesque et leurs indéracinables prolongements souterrains, les habitants de cette plaine étaient bien des hommes, non des arbres. Ils n'avaient ni feuilles, ni fleurs, ni ramures. Leur nudité permettait de voir qu'ils n'étaient point couverts d'écorce, mais d'une peau fine et blanche comme celle des barbares du nord. Ils avaient une tête et deux bras. Leur corps, dans son énormité, était de proportions harmonieuses et leurs poses variaient, souples et onduleuses, comme les attitudes des lutteurs. Parfois, ils s'asseyaient. Le soir, leurs jambes seules restaient droites comme deux troncs jumeaux, tandis que le