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liberté. Si le déterminisme avait la rigueur négative que postulent certains savants et qui leur semble nécessaire à la science, voici que la science elle-même deviendrait impossible. Construire la science, c’est agir. Si tout est déterminé d’avance, aussi le sera la direction de ton regard, ô physicien, qui cependant te proposes d’observer tel phénomène tout comme si tu étais libre de regarder où tu veux. Ton effort pour étudier le monde affirme la liberté, exactement dans la même mesure que mon effort pour me connaître moi-même. De la loi observée, tu tires des conséquences industrielles ; tu fais un geste aussi libre que moi lorsque de la connaissance de mon être je tâche de faire sortir le perfectionnement et l’harmonie de mon être. Jusqu’à ton application à prouver le déterminisme qui est un démenti à l’omnipotence du déterminisme. Pour me convaincre, au lieu de laisser tes pensées dans leur désordre premier, voici que, tel un général range son armée, ta volonté les ordonne selon une logique hargneuse. Toute tentative de raisonnement contient une affirmation de la liberté. Par le déterminisme logique — forme peut-être un peu grossière de la liberté intellectuelle — tu échappes au déterminisme physiologique ou psychologique qui t’imposait des idées dispersées, désarmées et imprécises. Ainsi la science, mère du déterminisme, est fille de la liberté.

L’action ne risquerait-elle pas, comme la science, de se détruire elle-même, si elle s’obstinait à ne postuler qu’un des deux contradictoires apparents ? Quel geste ferai-je encore, si je n’attribue pas à chacun de mes gestes une vertu causale, si je ne prévois pas quelques-uns de ses résultats ? Pour que j’agisse, il faut que je me croie libre ; il faut aussi