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d’un art moins habile, mais d’une grâce plus spontanée encore. La Fée des Chimères, avec ce charme inattendu d’une poésie craintive jusqu’à l’ironie, est de ces livres qu’on ne refait pas. Mais ce conte renfermait le germe de plusieurs romans. Il me semble la préface, pudiquement hésitante et balbutiante, de confidences plus directes sur le cœur de la femme. J’imagine que les livres soigneusement cachés forment le cycle de l’amour et du rêve féminins, et Cœur d’enfant en dit le premier chapitre.

Ceux-là qui ont remonté dans leurs souvenirs d’enfance sont nombreux et plusieurs ont rapporté des trésors de ces brumes lointaines. Certains vers de Sully-Prud’homme sont jolis et émouvants comme des enfants tristes exilés dans une cour de collège grossièrement tapageuse ; tels vers de Jean Aicard sont alertes comme des petits qui s’amusent. Le Roman d’un enfant de Loti est d’une grâce mièvre, vieillote et fausse ; peut-être l’auteur est-il sincère, mais l’homme est trop bêtement vaniteux pour retrouver l’enfant en sa naïveté simple et il attribue souvent au passé les idées du présent. Les pages où le peintre Jules Breton conte son enfance sont exquisement vraies. Pourtant, — si l’on oublie l’immortel Petit Chose et cette Vie d’enfant dont Batisto Bonnet a fait un merveilleux livre provençal et dont j’eus la gloire d’aider Alphonse Daudet à faire un livre français —