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rencontrée plusieurs fois au milieu de bas-bleus ineptes et bruyants, toujours occupés à faire la roue. Elle semblait d’abord effacée. Mais, dès qu’on échangeait quelques mots avec elle, on n’entendait plus les autres ; et, si vous regardiez ses yeux d’ironie et de tendresse, son sourire amusé et indulgent, rien ne pouvait plus vous en détourner. Tels ses livres, d’un charme discret, prenant et durable.

La composition de la Fée des Chimères est poétiquement timide. Le roman, intense et douloureux, n’est pas présenté directement. Il est aperçu, lueur trop vive, à travers la joliesse rose d’un écran. Un enfant naïf prend pour une fée une mélancolique délaissée, exige son histoire, obtient le conte attendu. Après des années, l’adolescent retrouve la triste marraine et elle avoue « la vérité sur la Fée des Chimères ». Ce qui dans un livre d’homme serait ingéniosité et amusante trouvaille littéraire est ici charmant de spontanéité : une douceur épeurée de mains féminines qui vont frôler une blessure.

L’habitation de la Fée des Chimères ressemble au livre lui-même et à l’esprit de Max Lyan. La réalité se voile de rêve et les pierres disparaissent sous les calices et les corolles. « Au sommet de la colline, une haute tourelle d’angle restée debout au milieu des ruines pittoresques se dressait en plein ciel, comme une gi-