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nération. Malgré l’âpreté sincère et contenue de cette satire, ce n’est pas ici que j’admire l’originalité de Marni.

Ce que j’aime chez elle, c’est toute la théorie des faibles et des attendris, tous les cœurs douloureux et qui essaient de consoler. Sur les chagrins d’enfant elle penche des grands-pères délicieux. Sous les résignations émouvantes de ses femmes trahies on sent un long passé de larmes et, parce qu’elles ne pleurent plus, elles nous font pleurer. Elle a créé d’exquises jeunes filles, d’un esprit avisé, d’un cœur tendre et que rendent précocement maternelles les fautes et les douleurs des parents. « Nos mères ont beau être plus vieilles que nous, quand elles aiment et qu’elles souffrent, elles redeviennent si faibles, que nous les aimons comme des enfants. »

Plus que ses grands-pères, plus que ses délaissées, plus que ses jeunes filles, j’adore ses petites filles et l’intelligence émue de leurs caresses. Oh ! leurs mouvements câlins et consolateurs et la grâce de tel geste si imprévu et à la fois si naturel et tout ce qu’il y a en elles d’humanité non encore déformée ! Oh ! la fidélité de leur souvenir aux malheureux que la loi appelle coupables et leur façon fraîche de sentir que la vie est autre chose que la société ! Attendri, je pardonne à celle qui a créé un peu de vie humaine d’avoir quelquefois fabriqué de la vie parisienne. Il fallait plaire aux vieux messieurs, dirait Jean-Jacques.