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vahis n’aient pas songé assez tôt à « la concrétation d’un plan de résistance » et elle nous démontre la « désidérabilité » d’une ligne de conduite élevée. La circonlocution lui plaît et l’entraîne à des phrases telles : « La sécheresse de cœur dont on a tant accusé cette brillante intelligence. » Elle a peur des mots, n’ose pas dire que le père de Benjamin Constant se maria avec sa servante. Elle avoue seulement, dans un haut-le-corps : « M. Juste de Constant avait épousé une personne attachée à son service ». Ah ! cette haine du mot propre qui nous vint des précieuses, ces bas-bleus de la conversation, et qui affadit deux siècles de notre littérature !

Malgré tous ses défauts, Mlle Mélégari n’atteint qu’au ridicule austère. Elle est une conscience. Elle fait ce qu’elle doit, puisqu’elle fait ce qu’elle peut. En soixante-onze pages in-8, je n’ai relevé qu’une tournure franchement incorrecte. Pour le jour où triompheront les revendications féministes et où les femmes auront obtenu les mêmes jouets grotesques que les hommes, je pose sa candidature à l’Académie. Elle sera sans doute très décorative sous la robe à palmes vertes. Car elle a beaucoup de tenue. C’est un bon professeur ou un parfait clergyman qu’il est juste de respecter et prudent d’éviter.