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J’ai sous les yeux un acte de Sarah Bernhardt, l’Aveu. Si j’ai bien compris, le neveu du brave général a violé la femme du brave général. Un fils est né de cette brutalité. Le voici malade, entre la vie et la mort, le pauvre petit. Or le papa-cousin est docteur et, comme le brave général n’a confiance qu’en lui, malgré les répugnances de la mère, c’est lui qui soigne l’enfant. Il me semble que nous sommes en plein dans une de ces sottises laborieusement combinées qu’on décore du nom ambitieux de situations dramatiques. Une fois connues les données banales du banal problème, tous les Sarcey du monde vous indiqueront, suivant une méthode aussi infaillible que mécanique, les scènes à faire. Sarah les a faites et je ne m’attarderai pas à conter ces extravagances prévues.

Signalerai-je le romantisme naïf de la phrase. Le général, quand il sait tout, s’écrie en voyant pleurer sa femme, victime bien innocente pourtant, et qu’il devrait consoler : « Ah ! pleurez, pleurez, vos larmes coulant jusque dans l’éternité ne pourront laver la plaie béante de mon cœur arraché. Pleurez et priez pour celui qui va mourir. »

Et la femme — sotte comme on doit l’être au théâtre pour amener dans ce qui sert d’esprit aux spectateurs de frissonnantes indécisions — prend le change.

« Oh ! — crie-t-elle — vous voulez tuer mon enfant ! »