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Judith Cladel essaye les tours de force de Léon Cladel. Parfois elle réussit une image nette et brutale : « Une jeune fille qui a juré d’empêcher les gens de s’aimer parce que sa mère fut une sainte malheureuse, indignement sacrifiée par un égoïste, est un oiseau qui voudrait retenir de ses ailes étendues le torrent au fond duquel tombèrent son nid et sa couvée. » Le plus souvent, on sourit à voir ses puériles idées courir par les sentiers de montagne que fraya son père, ridiculement petites et prétentieuses entre l’énormité abrupte des rocs. On s’amuse à l’écouter gazouiller les grondements de tonnerre et les fracas d’avalanche que sa voix croit pouvoir répéter parce qu’ils sont familiers à son oreille. Voyez de quel geste mou elle manie la grande phrase rugueuse du romancier épique. « Quelle glorieuse coïncidence pour cette Scandinavie, marge extrême de l’Europe vers le septentrion et les boréalités, que de pouvoir ainsi se (?) montrer au monde, pareils à des géants se dressant sur ses monts glaciaires dans l’horizon de ses mers aux vaisseaux rares, de ses flots tourmentés, léchant les blessures sans nombre en lesquelles ils ont déchiré et déchiqueté ses côtes, comme fait un chien des blessures ouvertes par ses dents, ces deux personnalités colossales résumant en un couple de super-