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le massacre des amazones.


L’homme vit soixante ans, l’arbre vit cent années :
Vous en comptez six mille et vous durez encor !

Vous usez les forêts, les hommes, la verdure,
Comme une sentinelle userait son manteau
Immobile à son poste ; — et seuls dans la nature
Vous n’avez ici-bas ni berceau ni tombeau.


Lamartine est autrement pénétrant et profond ; mais ces lieux communs éloquents valent les meilleures solennités de Chênedollé, et je ne les trouve pas plus superficiels que les dorures brutalement aveuglantes que fait sonner José-Maria de Hérédia, rastaquouère de la poésie, ou que les raides symétries dessinées par Henri de Régnier.

Par le sourire pincé, par la tristesse jolie et légère, par la précision spirituelle et un peu sèche, tels octosyllabes d’Ernestine Drouet rappellent les plus aimables pièces d’Arnault.

À ces méditations où la poésie et le convenu se mêlent à doses diverses, je préfère les effusions personnelles : elles disent une âme simplement charmante, et les sourires d’une jeunesse pauvre, qui ne méprise pas les biens extérieurs, mais qui ignore la plainte, qui est habile à jouir de tout et douce aux à peu près. Ahl l’âme gracieuse, jeune et point puérile, tendre, résignée, sans envie. Voici comment elle parle d’une amie plus heureuse :