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raison, comme les stoïciens quand ils saluent dans leur sage « le seul riche ».

Il ne peut rien manquer au sage qui déclare indifférent tout ce qui ne dépend pas de lui, qui étanche joyeusement à sa sagesse la soif de sa raison, qui en un voluptueux orgueil rassasie à sa justice et à son indulgence la faim de son cœur. Projeté tout entier à ses deux sommets, il ne daigne plus apercevoir ce que les basses circonstances refusent peut-être à son corps.

Dans l’objectif, le reste ne sera donné par surcroît que lorsque la majorité des hommes montera jusqu’à la sagesse. Sagesse universelle égalera bonheur universel, et ce bonheur contiendra, dans sa mutualité et sa plénitude, jusqu’au surcroît des biens matériels. Rêver cette Arcadie dans un sourire d’extase et de scepticisme est une joie délicate de poète. L’affirmer pour demain ou après-demain ne va pas sans quelque folie mystique. La foule se convertira-t-elle jamais au stoïcisme, à l’épicurisme d’Épicure ou au christianisme de Jésus et de Tolstoï ? Elle a pu répéter les formules de l’une ou de l’autre de ces doctrines ; mais ce fut pour les avilir et les vider de tout contenu. Le sage ne se promet pour demain ni les extériorités un peu lourdes d’un paradis