Page:Ryner - L’Homme-fourmi, Figuière.djvu/77

Cette page n’a pas encore été corrigée

étaient plus unis, plus cimentés, mieux défendus contre l’humidité qui eût gâté nos provisions. Parfois j’y rencontrais quelques ouvrières qui procédaient à un nouveau tassage des parois. Car l’absolue sécheresse qui permet de garder les grains intacts sans commencement de germination n’est conservée que par des soins continuels et des travaux à chaque instant renouvelés.

Dans une case à grains, un léger commencement d’humidité blessa mon odorat ; mon instinct l’emporta sur ma tristesse et la convexité de mes mandibules frappa les murs vaillamment, jusqu’à ce que tout me parût en état.

Cependant certains grains étaient dans une case humide et qui devait rester humide. Ce blé était destiné à être consommé bientôt. Les mâchoires des fourmis, puissants et ingénieux outils de travail, sont impropres à mâcher. Nous ne pouvons nous nourrir d’aliments tout à fait solides, nous aimons surtout à laper et lécher des liquides. Le blé devait donc, avant de servir à nos repas, subir un commencement de germination, se ramollir, et son amidon se transformer en un délicieux sucre fluide.