Page:Ryner - L’Homme-fourmi, Figuière.djvu/198

Cette page n’a pas encore été corrigée

répétés, l’espoir de la délivrance. Elles n’eurent guère à se déplacer pour suivre le lent abaissement.

Le soleil se leva. Nous nous mîmes à fouiller tous les recoins de notre arbre, cherchant quelques insectes à dévorer. Maigre chasse et qui ruina, pour un seul repas insuffisant, toutes nos ressources.

Nous n’avions plus maintenant qu’à attendre, attendre que les choses consentent enfin à nous délivrer ou que leur obstination nous tue.

Des jours passèrent. On commença à mourir, en regardant l’eau qui baissait si lentement. Quelques camarades dévorèrent les premiers cadavres et furent blâmées universellement.

Les cadavres du second jour de mort furent partagés entre tout le peuple. On mangea aussi les œufs, les larves et les nymphes. Le troisième jour, ton trouva les cadavres trop rares, et on se battit autour pour avoir son morceau. Le quatrième jour, on tua pour manger.

Plus voisine de la rive, des îles d’herbes fangeuses émergeaient, de plus en plus nombreuses, de plus en plus rapprochées, tremplins d’où, jusqu’à la terre ferme, nos espoirs obstinés rebondissaient. Deux journées interminables, deux journées de faim et de crimes, passèrent encore avant qu’à travers mille pièges gluants, il fût possible de gagner le bord.