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J’aperçus, debout, au loin, le général qui nous accablait de tant de maux. Je résolus de mourir ou de le tuer. Rapide et directe, sans parer ni rendre un coup, au milieu des bataillons ennemis je me précipitai vers lui. Comme j’allais l’atteindre, plusieurs me saisirent, m’entraînèrent. Et je me sentis heureuse. C’était bien : ce soir je serais punie de mon crime. Ce soir je mourrais puisque Marie était morte et je mourrais longuement, en des supplice raffinés qui me feraient savourer la mort comme une volupté de désespéré…

Voici que le combat, un instant, hésite, s’arrête. Que se passe-t-il ? Une prisonnière ennemie revient de chez nous, parle au chef que je voulus tuer. Le conciliabule se prolonge. Puis les antennes des deux interlocuteurs se tournent vers le point où je suis. Une estafette arrive, parle à celles qui me gardent. On me conduit devant le général, enchaînée. Je veux dire que chacune de mes pattes est tenue par un gardien.

Avec des lenteurs, des hésitations, des mouvements repris — car nous parlons deux dialectes assez différents de l’aphœnogaster — il me dit à peu près ceci :

— Votre général est fou. Il me propose de terminer la querelle par un combat singulier. Certes, je ne me crois ni moins brave ni moins forte que lui. Mais j’ai trois fois plus de soldats et aujourd’hui encore vous commencez à plier. Si, par un