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minutes, on s’étreignait, se délivrait, s’attaquait de nouveau, se renversait, se relevait, avec une ardeur qui ne se lasse pas, avec un amour-propre qui ne permet à aucun de se reconnaître vaincu.

Il m’arrivait rarement de combattre. J’aimais mieux regarder, jouir par mes deux pensées : l’une qui voyait à l’aide de mes yeux d’alors, l’autre qui se souvenait. Car sur mon cerveau gauche souriaient de plaisantes images : sous une tente, des lutteurs nus, en des mouvements qui faisaient valoir la jeunesse forte et souple de leurs formes, se pressaient, se tordaient, se soulevaient. Comme le ciel nocturne s’anime d’étoiles, le spectacle recevait une vie.nombreuse de tant de regards curieux. Et un long silence d’attente vibrait, comme tendu, pour soudain crépiter d’unanimes applaudissements.