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Délos. Moi, je suis un maladroit fixeur d’îles. Je ne réussis à atteindre leur balancement fuyant que par des ruses, trop gauches sans doute, qui toujours les brisent en morceaux, les dispersent dans l’infini noir. Et il m’est difficile d’inscrire une date un peu exacte sur les rares débris que je saisis.

Pourtant je suis presque certain que les grands combats commencèrent vers la fin de la moisson.

On se prépare longtemps à l’avance pour cette récolte qui doit nous nourrir toute l’année. Les plantes qui fourniront nos grains sont à peine en fleur, et déjà on se préoccupe de faciliter les futurs travaux. On visite d’abord les terrains de moissons de l’année dernière et on cherche tout autour du nid, dans un rayon de cinquante à soixante mètres, si de nouveaux champs se sont créés.

Aussitôt que les divers domaines à moissonner sont bien connus, on relie les nouveaux à la fourmilière par des routes neuves et on répare les vieux chemins détériorés par l’hiver.

Les routes sont d’un tracé net et vont presque toujours en droite ligne. On les établit en creusant légèrement le sol et en débarrassant le parcours de tous les déblais, pierrailles, feuilles et autres obstacles qui pourraient entraver la marche. Les herbes, fauchées à ras du sol avec nos mandibules, sont rongées de nouveau chaque fois qu’elles