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D’être harmonieux, de suivre la nature. Mais la nature humaine est chose complexe et la raison elle-même nous éloigne de supprimer nos richesses.

Les Stoïciens disaient : L’homme est naturellement ami de l’homme. Qu’est-ce que cette façon de comprendre la nature sinon l’obéissance au cœur ?

Les Stoïciens disaient que nous devons être des harmonies. Une harmonie ne se forme pas d’une seule note, d’une seule tendance nous devons donc concilier en nous des tendances multiples. Seulement les Stoïciens veulent que nous établissions une puissante hiérarchie intérieure et que nous maintenions la raison au-dessus de tout. Ces Stoïciens, par exemple, qu’on accuse de manquer de cœur ont les premiers inventé le mot charité, mot devenu bien laid ; devenu, dans la décadence chrétienne, le synonyme de l’aumône, avilissante pour deux êtres. Mais primitivement charité signifie grâce, exprime l’amour avec tout son cortège de spontanéités et de sourires. Ce sont les Stoïciens qui, les premiers, — je traduis mot à mot une parole de Cicéron — ont inventé « la vaste charité du genre humain », c’est-à-dire l’amour pour tous les hommes.

Épicure donnait une grande place au cœur. Les Épicuriens sont célèbres par leurs amitiés. Lorsque les statuaires représentaient Épicure, ils sculptaient toujours derrière lui le visage de Métrodore. Vous ne trouverez jamais un buste d’Épicure seul ; toujours des bustes géminés unissent, pour l’immortalité de l’art, les deux amis.

Seulement l’Épicurien n’aime que ses amis, tandis que le Stoïcien répand sur tous les hommes son cœur généreux.

Vous voyez combien les Stoïciens se rapprochent de