Page:Russell - The Problems of Philosophy, 1912.djvu/82

Cette page n’a pas encore été corrigée

pouvons le supposer, bien qu’ils aient une accointance avec les données sensorielles, ne prennent jamais conscience de cette accointance, et donc ne connaissent jamais leur propre existence. Je ne veux pas dire qu’ils doutent de leur existence, mais qu’ils n’ont jamais pris conscience du fait qu’ils ont des sensations et des sentiments, ni par conséquent du fait qu’ils existent, eux, les sujets de leurs sensations et de leurs sentiments.

Nous avons parlé de l’accointance avec le contenu de notre esprit comme de la conscience de soi, mais il ne s’agit pas, bien sûr, de la conscience de notre soi : c’est la conscience de pensées et de sentiments particuliers. La question de savoir si nous sommes également en accointance avec notre moi pur, par opposition à des pensées et des sentiments particuliers, est une question très difficile, sur laquelle il serait imprudent de se prononcer positivement. Lorsque nous essayons de regarder en nous-mêmes, nous semblons toujours tomber sur une pensée ou un sentiment particulier, et non sur le « je » qui a cette pensée ou ce sentiment. Néanmoins, il y a des raisons de penser que nous connaissons le « moi », bien que cette connaissance soit difficile à démêler d’autres choses. Pour bien comprendre