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resplendir, dans sa gloire, même à travers les apparences insensées et mauvaises de l’homme. Le poète, l’artiste et l’amant sont à sa recherche : l’obsédante beauté qu’ils poursuivent n’est que le pâle reflet de son soleil. Mais, ce que d’autres cherchent obscurément, le mystique qui vit dans la pleine lumière de sa contemplation en a une connaissance auprès de laquelle toute autre connaissance est ignorance. La seconde caractéristique du mysticisme est la croyance en l’unité, et le refus d’admettre une opposition ou une division où que ce soit. Nous avons vu qu’Héraclite disait : « Le bien et le mal sont une seule et même chose » ; et il dit encore : « Le chemin vers le haut et celui vers le bas est le même ». On reconnaît la même attitude lorsqu’il pose à la fois deux propositions contradictoires comme : « Nous descendons et ne descendons pas dans le même fleuve ; nous sommes et ne sommes pas ». C’est cette même tendance vers l’unité qui pousse Parménide à soutenir que la réalité est une et indivisible. Chez Platon, cette tendance est moins apparente, étant enrayée par sa théorie des Idées ; mais elle se montre de nouveau, autant que la logique l’autorise, dans sa doctrine du primat du Bien. Un troisième caractère de presque toute métaphysique mystique est la négation de la réalité du temps. C’est là une des conséquences de la négation de la