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choses sont dirigées par toutes choses[1]. »

On aurait pu multiplier les exemples, mais ceux que l’on vient de donner montrent suffisamment le caractère de l’homme : tels qu’ils lui apparaissaient, les faits scientifiques entretenaient le foyer de son âme ; et à sa lumière il lisait dans les secrets de la nature qui reflétait son feu subtil et ondoyant. C’est dans un tempérament de ce genre que l’on peut observer la véritable union du mystique et du savant — le plus haut degré d’excellence, à mon avis, qu’il soit possible d’atteindre dans le domaine de la pensée.

Les mêmes tendances se retrouvent chez Platon, quoique la tendance mystique soit nettement la plus puissante des deux et remporte toujours la victoire finale dans un conflit de quelque importance. Sa description de la caverne est un exposé classique de la croyance en une connaissance plus vraie, et en une réalité plus réelle que celle des sens :

Socrate. — Représente-toi maintenant l’état de la nature humaine par rapport à la science et à l’ignorance d’après le tableau que je vais faire. J’imagine des hommes renfermés dans une demeure souterraine, caverneuse, qui donne une entrée à la lumière dans toute la

  1. Toutes les citations qui précèdent sont extraites de John Burnet : L’Aurore de la philosophie grecque (édition française par Aug. Raymond), pp. 149-158, in-8, Payot, Paris.