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envers la destinée : « De telles choses ne sont pas permises dans ce monde. Les hommes capables de la plus haute passion imaginative sont toujours secoués par elle sur des vagues furieuses. Ceux qui peuvent y trouver une eau tranquille et non brûlante sont d’une autre espèce.... » — Sa foi, il croyait la posséder encore, sinon telle qu’il l’avait puisée dans la lecture des Psaumes sous les groseilliers de Herne Hill, du moins telle que son admiration pour George Herbert et les Vaudois l’avait faite. Il se rappelait bien qu’un dimanche, à Gap, il avait « rompu le sabbat », en ascensionnant, après le service, dans les montagnes aimées. Et cette victoire de sa passion pour la nature sur ses devoirs religieux lui était demeurée un souvenir cruel. Douze ans après, il avait osé dessiner le dimanche. Puis le dégoût des étroitesses des sectes, qu’on lui avait appris à aimer, la vue de plus en plus nette des beautés esthétiques du catholicisme qu’on lui avait appris à abhorrer, les doutes que la science sème sur nos chemins à tous, l’avaient plongé dans cette incertitude que Mallock, son disciple, a dépeinte dans sa New Republic : « Suis-je un croyant ? Non, car je suis un sceptique aussi. Autrefois je pouvais prier chaque matin et j’allais à mon travail de la journée, raffermi et réconforté. Mais maintenant je ne peux plus prier. Vous avez