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Et lorsque nous lisons vos reproches, il nous semble que nous sommes des soldats dans les tranchées de Sébastopol, recevant des ordres de leur général qui est à dîner à son club à Londres. De plus, je suis tout à fait d’accord avec vous pour détester les chemins de fer, mais je vous soupçonne d’en user et quelquefois de les prendre. Moi, je ne le fais jamais. Vous êtes, dans vos livres, comme un clergyman en chaire. Il peut invectiver la congrégration et la congrégation ne peut répondre. Mais voici qu’elle répond !…

À cette vive attaque, le prophète ne se dérobe pas. Il insère la lettre de la congréganiste récalcitrante dans le plus prochain numéro de Fors et y répond :

On m’accuse de n’avoir pas de home. C’est trop vrai. Mais c’est parce que mon père, ma mère et ma nourrice sont morts, parce que la femme dont j’espérais faire ma femme est mourante et parce que l’endroit où j’aurais rêvé de demeurer est rendu matériellement inhabitable par la violence des voisins, — c’est-à-dire par la destruction des champs dont jjavais besoin pour penser et de la lumière dont j’avais besoin pour travailler… Quant aux chemins de fer, j’en use constamment, chère madame, peu d’hommes en usent plus que moi. J’use de chaque chose qui passe à ma portée. Si le diable se tenait à mon côté en ce moment, je m’en servirais comme d’une note noire dans un tableau. La sagesse de la vie consiste à empêcher tout le mal qu’on peut et à