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ning, John Lubbock et Huxley. Enfin, le jour où il lui semble que la critique d’art ne peut sérieusement améliorer l’art d’un pays, ni même rendre l’impression que des œuvres médiocres, il ne songe pas un instant qu’on pourra retourner cet aveu contre lui, contre les trente volumes où il a mis sa vie, et il proclame hautement ce qu’il vient de découvrir : « Vous m’avez envoyé chercher pour vous parler d’art et je vous ai obéi en venant. Mais la principale chose que j’aie à vous dire, c’est qu’on ne doit pas parler sur l’art. Aucun vrai peintre ne parle jamais, ni n’a jamais parlé beaucoup de son art. Le plus grand ne dit rien… » C’est là une des nombreuses phrases de ses livres qui ont fait crier à la contradiction et considérer le Maître des Pierres de Venise comme un Bonghi ou un Chamberlain de l’esthétique. Et en effet il s’est contredit, parce qu’il a pensé des choses différentes sur le même sujet à différentes époques. Nous en sommes tous là, seulement nous ne les disons point. Puis nous ne commençons pas, d’ordinaire, à imprimer dès quinze ans, et ceux d’entre nous qui écrivent encore à soixante-huit ans avec toute leur vigueur d’esprit sont rares. Ruskin s’est hâté de dire ce qu’il pensait, sans retenue, et il n’a cessé de penser. Il n’a pas attendu pour écrire d’être sûr que ses idées fussent fixées, et plus tard