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seul volume, les Sept Lampes de l’Architecture, a rapporté 75 000 francs à son auteur. Le profit net d’une seule édition des Modern Painters s’est élevé à 150 000 francs. Des volumes qui datent de trente ans comme Sésame et les Lys, se vendent encore à raison de trois mille exemplaires par an, chaque exemplaire étant de 6 francs. Les roses de Sunnyside ont porté bonheur aux lys du jardin de Maud, et la librairie esthétique « établie dans les solitudes du Kent », comme une protestation contre la laideur des boutiques modernes, apparaît aussi comme la prodigieuse habileté de ce rêveur.

Ainsi les actes, chez Ruskin, ont toujours suivi de près les idées. Sa devise est To-day. S’il écrit, c’est comme on se bat, pour obtenir des résultats évidents, immédiats, décisifs. Et il en a obtenu, sinon autant qu’il en a cherché, du moins plus qu’aucun critique d’art n’en pourrait montrer. La première chose qui frappe l’étranger se promenant dans les salles de la National Gallery, c’est l’éclat cristallin de toutes les toiles : il s’aperçoit alors qu’elles sont toutes sous verre, comme nos aquarelles. L’atmosphère enfumée de Londres oblige les Anglais à prendre cette précaution, mais ils ne la prenaient pas, autrefois, et c’est Ruskin qui, en 1845, dans une lettre adressée au Times, suggéra cette idée qui finit par être adoptée. Une