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pour les tricots qu’on fera à la maison, soit en laine préparée pour le filage au rouet. Ces conceptions hardiment réactionnaires n’ont point fait sombrer l’industrie du Laxey homespun. Elles ne sont d’ailleurs rétrogrades qu’au premier aspect. Elles ouvrent sur l’avenir de curieuses échappées et quand Ruskin nous dit que toute industrie doit emprunter sa force motrice aux vents, aux fleuves, on ne peut s’empôcher de se demander si cet esthéticien n’a pas trouvé dans ses rêves la formule de tout le machinisme à venir, applicable le jour où l’électricité, en transportant les forces, aura mis la puissance immense et inutilisée des fleuves et des vents, non plus seulement au service des riverains ou des montagnards, mais à la portée de tous...

S’il a aussi vigoureusement lutté, au dehors, parmi les foules indifférentes, pour la subordination de la vie publique aux lois esthétiques, à plus forte raison leur a-t-il subordonné la sienne. Il n’est pas de ces prêtres qui, selon son expression, « vont dîner chez les riches et prêcher les pauvres ». Chez lui, à Brantwood, au bord du lac de Coniston, il a imaginé des défrichements fort coûteux afin de détourner les paysans du travail des villes qui les enlaidit et pourtant les attire. Il a donné lui-même l’exemple du labeur musculaire en bâtis-