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Depuis que j’ai composé et médité là pour la dernière fois divers « embellissements » sont survenus ; d’abord le voisinage avait besoin d’une nouvelle église ; ils ont bâti une église d’un pauvre gothique avec un clocher sans utilité, mais parce que la chose est à la mode, sur un côté du champ. Puis, derrière, on a bâti une cure, les deux bâtiments cachant une moitié de la vue de ce côté. Ensuite est venu le Palais de Cristal gâtant pour toujours la vue dans toute sa longueur et amenant chaque jour d’exposition un flot de gens qui prenaient le sentier et qui le laissaient malpropre avec des cendres de cigare pour le reste de la semaine. Ensuite vinrent les chemins de fer et les voyous arrivant par chaque train de plaisir, qui jetaient bas les palissades, effrayaient les vaches et cassaient autant de branches de fleurs qu’on en pouvait atteindre sur les clôtures. Alors les propriétaires bâtirent un mur de briques pour se protéger. Alors le sentier devint d’une chaleur insupportable autant que sale et fut peu à peu abandonné aux voyous avec un policeman en faction au bout. Enfin, cette année, une palissade de six pieds de haut a été placée de l’autre côté et l’excursionniste, marchant à la queue leu leu, est libre de s’offrir telle notion de l’air, de la campagne et de la vue qu’il peut, entre ce mur et la palissade, avec un mauvais cigare devant lui, un second derrière et un troisième dans sa bouche.

Quand c’est la nature elle-même qui a voulu changer, il s’en plaint plus doucement, mais comme d’une infidélité. « Oui, écrit-il d’Angleterre à un ami qui est dans les Alpes, Chamonix est une demeure désolée pour moi. Je n’y retournerai plus, je crois. Je pourrais éviter la foule en hiver et dans