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de la terre, qu’ils souhaitaient, en quittant la terre, ne pas trouver autre chose dans le ciel. Ou plutôt cette terre avait été leur ciel même.

Ainsi la passion de la Nature a été pour Ruskin le commencement et la fin de tout. Elle a composé chaque trait de sa physionomie ; elle a dicté chacune de ses paroles ; elle a dirigé le cours de chacune de ses pensées. Elle a été le feu qui éclaire ; elle a été le feu qui réchauffe ; elle a été le feu qui purifie. Elle l’a gardé des petitesses de la haine ; elle l’a distrait des tourments de l’amour. Elle l’a fait passer par les sentiers de l’analyse pour mieux connaître l’objet aimé ; elle l’a conduit aux sommets de la synthèse pour mieux aimer l’objet connu. Elle lui a fait rechercher la science, car la science pénètre plus avant certains domaines de la Nature ; elle l’a sauvé des vanités de la science en lui révélant entre les choses, le domaine des rapports esthétiques que la science ne perçoit ni ne suppose par cette seule raison qu’elle est la science et non pas l’art. Elle a fixé sa vue de l’Art et dicté ses définitions. Enfin elle l’a dressé contre l’Homme triomphant qui prétend corriger la Nature, et courbé vers l’homme souffrant par une sympathie profonde envers ceux qui vivent péniblement parmi les joies de la Nature, ou ceux qui, dans nos cités artificielles du xixe siècle, en sont à jamais privés.... S’il n’est