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vous ne pourrez porter qu’à un seul bal, alors vous employez votre argent égoïstement. Vous avez, il est vrai, fait travailler dans chaque cas le même nombre de gens ; mais, dans un cas, vous avez employé leur travail au service de la communauté ; dans l’autre, vous l’avez entièrement consumé au vôtre. Je ne dis pas que vous ne deviez pas quelquefois penser seulement à vous et vous faire aussi belle que vous le pouvez. Seulement ne confondez pas la coquetterie avec la philanthropie et ne vous illusionnez pas vous-même en pensant que toutes les parures que vous pourrez porter sont autant de pain mis à la bouche de ceux qui sont au-dessous de vous.... »

Ne confondons pas non plus la vanité avec l’amour des arts, et n’allons pas plaider pour le luxe sous prétexte qu’il entretient le goût de la Beauté. Car la plupart des grandes œuvres du Moyen-Âge sont dues non pas du tout au luxe personnel d’un particulier, mais bien au contraire à l’encouragement d’une collectivité. Et de nos jours, pour encourager vraiment l’Art, ce n’est pas le trésor d’un Mécène qu’il faudrait, mais la coalition des petites bourses. « Au lieu d’un patron capitaliste payant 8000 francs un portrait en pied le représentant, plaçant son capital, il vaudrait bien mieux que ses ouvriers coalisés fussent capables de remettre