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couteau et le livre au lieu de se mettre au lit et d’avoir à payer le médecin. »

Ainsi, ce n’est pas une étude superflue que celle de la dépense, quand on étudie les causes de la misère et ses remèdes. Et la question n’est point seulement de savoir si les riches dépensent leur argent et s’il sert à donner du travail, mais encore de préciser comment ils le dépensent et à quoi peut servir ce travail. Car le bon sens, à défaut de science, et l’économie humaine, à défaut d’économie politique, nous disent que d’employer cet argent à des objets de luxe qui ne nourriront personne et seront consommés rapidement sans aucun produit de santé ou de richesse, ce n’est pas la môme chose que de l’employer à faire des routes, des ports, des canaux, de l’assainissement, qui non seulement accroîtront la richesse des ouvriers qu’on emploiera, mais encore le patrimoine commun de l’humanité. Et plaider pour le luxe, parce qu’il fait vivre les ouvriers de luxe, ne deviendrait un solide argument que du jour où l’on aurait démontré que les ouvriers de luxe sont plus intéressants que les autres, où l’on aurait du moins prouvé qu’ils sont plus nombreux et que par conséquent le bien-être général des travailleurs doit leur être sacrifié, démonstration que les partisans du luxe ne sont pas près de faire....