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où ils devraient être et que le désir de s’élever dans l’échelle sociale les a chassés de l’atelier modeste où ils eussent fait des merveilles et les a jetés parmi les peluches et le bric-à-brac des hôtels de Kensington ou de l’avenue de Villiers, où ils font de la confection. Des écoles sans nombre de peinture et de sculpture ont centuplé les gens faisant profession d’artistes. Il n’est plus vraisemblablement, parmi tous les pâturages de l’Europe, un seul Giotto gardant des moutons ou des chèvres ; et il n’est guère probable qu’avec la baisse du papier de nouveaux Miltons s’endorment inconnus dans les cimetières de village. Mais toutes ces écoles, dont nous sommes si fiers, en donnant l’ambition, n’ont pas donné le génie. Elles ont simplement écrémé sans profit pour la peinture ou la sculpture les meilleurs artisans qui eussent intelligemment décoré un soubassement ou sculpté un chapiteau de colonne. L’ébéniste à la main sûre, qui eût composé et exécuté une crédence d’un bel ensemble, est devenu architecte et ordonne de ridicules palais d’Exposition. Le plâtrier à l’œil fin, qui eût décoré de tons justes et d’ornements harmonieux les plafonds et les voûtes, est devenu peintre et stérilement s’épuise en des tableaux d’histoire. Toute la Démocratie ouvrière voulant être artiste, il ne reste plus un artiste