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écoles, comme au moment des dissensions de l’Église, il y a eu des saints dans toutes les obédiences. Mais les dessinateurs purs ont dû regarder les choses loin du soleil qui fait miroiter trembler et se confondre les lignes. Les clairobscuristes, eux, les ont regardées dans le demi-jour et le mystère des ateliers, dont ils ont parfois peint les murs en noir, afin de concentrer toutes les forces de la lumière en un foyer qui incendie une chair, embrase une armure ou allume les pointes des lances comme des cierges. Quiconque regardera les choses en plein jour et en plein air, simplement, naïvement, gaiement, ainsi que la Nature elle-même nous les montre, les verra non comme des damiers noirs et blancs, mais comme des agglomérations de points colorés. « Il faut donc considérer toute nature purement comme une mosaïque de différentes couleurs qu’on doit imiter une à une en toute simplicité », et ne tenir aucun compte des prétendues lois du clair-obscur ou de l’ombre. Il faut suivre l’Angelico et le Pérugin qui sont sans ombre, sans tristesse, sans mal et non le Caravage ou l’Espagnolet, ces esclaves noirs de la peinture. Il n’y a pas d’ombre en soi, pas plus que de lumière en soi : il n’y a que des couleurs plus fortes, plus épaisses, plus profondes ! Arrière donc le gris, le noir, le brun et tout ce goudronnage des paysa-