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nous montrer ? nous répondrons donc : Simplement la Nature telle qu’elle est et l’Homme tel qu’il a été. Le chemin de la Nature naturelle est facile à prendre : c’est celui qui mène aux vallées que l’industrie respecte encore et aux mers qu’elle ne peut souiller. Pour le peintre de figures et le sculpteur, c’est peut-être une entreprise difficile que de restituer l’Homme d’avant le vice et d’avant l’inesthétique labeur, mais du moins faut-il tendre obstinément vers cette réalité et non vers quelque chose d’autre que la réalité. Il ne faut rien généraliser, rien ajouter, rien embellir, mais on peut ôter dé la face d’un homme les signes de dégradation que les artifices de notre temps y ont mis. On ne doit rien inventer, en dehors de la réalité ; mais on peut effacer les surcharges que la civilisation et les malheurs ont faites à la réalité. Ce n’est pas là effacer des vérités naturelles, c’est au contraire restituer le texte véritable en faisant disparaître l’interpolation.

Et observez par-dessus tout que ce travail ne doit pas être un travail d’imagination. Naufragés nous sommes et presque tous en morceaux, mais ce peu de bien par lequel nous pouvons nous racheter nous-mêmes doit être tiré des vieilles épaves du naufrage, si battues et si pleines de sable qu’elles puissent être, — et non pas de cette île déserte d’orgueil où se sont échoués les démons d’abord et nous après eux !… Nous devons donc poser