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portraits de leurs patrons, de leurs valets, de leurs maîtresses et de leurs créanciers ; et c’était là « non une erreur, mais bien la source de leur vraie grandeur et de leur supériorité, car ils étaient trop grands et trop humbles pour ne pas voir dans chaque face autour d’eux ce qui était au-dessus d’eux et ce qu’aucune imagination d’eux-mêmes n’aurait pu ni égaler, ni remplacer ! »

Et s’il s’agit de ces régions de rêve où nous ne sommes jamais allés et de ces êtres de foi que nous n’avons jamais vus, quel besoin avons-nous de les peindre ? Quand les maîtres l’ont tenté, ils sont toujours restés au-dessous d’eux-mêmes. « Tout ce qui est vraiment grand dans l’art chrétien se restreint rigoureusement à ce qui y est humain, et même les extases des âmes rachetées qui entrent celestamente ballando par la porte du paradis de l’Angelico furent aperçues d’abord dans la gaieté terrestre encore que très pure des Florentines. » À aucun moment, « la créature n’a conçu ce qui est supérieur à la créature », et il n’est point utile qu’elle le puisse, ni convenable qu’elle le veuille. Ne pas voir la Beauté dans une hirondelle et s’imaginer la mettre dans un séraphin, quelle folie ! « Si vous n’êtes pas inclinés à contempler les ailes des oiseaux que Dieu vous a donnés à voir et à toucher, beaucoup moins devez-vous l’être à con-