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être de meilleure heure initiée aux sujets profonds et sérieux. Ses connaissances littéraires devraient être moins frivoles, au lieu de l’être davantage ; calculées pour ajouter les qualités de patience et de sérieux à son jugement naturellement primesautier et à sa vivacité d’esprit, ainsi que pour la maintenir dans une sphère de pensée haute et pure. Je n’entre ici dans aucune question sur le choix des livres ; assurons-nous seulement que, lorsqu’elle ouvre le paquet du cabinet de lecture, ses livres ne tombent pas en tas sur ses genoux, humides encore de la récente et légère écume de la Fontaine de la Folie.

76. Ni même de celle de l’esprit. Car pour ce qui est de cette maladive tentation de lire des romans, ce n’est point tant ce qu’il peut y avoir de mauvais dans un roman que nous devrions craindre, que l’intérêt excessif qu’il provoque. Le roman le plus nul n’est point aussi stupéfiant que les basses productions de la littérature religieuse excitante ; et le pire roman n’est point aussi corrupteur que la fausse histoire, la fausse philosophie et les faux écrits politiques. Mais le meilleur roman devient dangereux, si, par l’excitation qu’il cause, il rend fade le cours ordinaire de la vie et accroît notre soif morbide pour l’inutile connaissance de scènes que nous ne serons jamais appelés à jouer.

77. Je parle donc des bons romans seulement, en variétés desquels notre littérature moderne est particulièrement riche. Bien lus, ces livres sont d’un sérieux profit, n’étant rien moins que des traités d’anatomie et