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restant sur place et jamais dévastatrice, ni meurtrière, mais ne pouvant être vaincue par la douleur, ni par la mort, — devint la semence de tout l’amour qui était appelé à naître et le moment venu donna alors à l’humanité mortelle ce qu’elle était capable de recevoir d’espérance, de joie ou de génie et, — s’il y a une immortalité — amena, par-delà le tombeau, à l’Église ses Saints protecteurs et au Ciel ses Anges secourables.

14. De cet ordre de créatures d’humble condition, silencieuses, inoffensives, infiniment soumises, infiniment dévouées, aucun historien ne s’occupe jamais le moins du monde, excepté quand elles sont volées ou tuées. Je ne puis vous en donner aucune image, en amener jusqu’à votre oreille aucun murmure, aucun cri. Je puis seulement vous montrer l’absolu « doit avoir été » de leur passé non récompensé, et l’idée que tous nous nous sommes faite d’elles, et les choses qui nous en ont été dites reposent sur des faits plus profonds de leur histoire, qui n’ont jamais été ni conçus, ni racontés.

15. La grande masse de cette innocente et invincible vie paysanne, est, comme je vous l’ai dit plus haut, groupée dans les districts féconds et tempérés (relativement) de l’Europe montagneuse, allant, de l’ouest à l’est, de l’extrémité du pays de Cornouailles à l’embouchure du Danube.

Déjà, dans les temps dont nous nous occupons en ce moment, elle était pleine d’une ardeur naturellement généreuse et d’une intelligence ouverte à tout. La Dacie donne à Rome ses quatre derniers grands empereurs[1] ;

  1. Claudius, Aurélien, Probus, Constantius ; et après le partage de l’empire, à l’est Justinien. « L’empereur Justinien était né d’une obscure race de barbares, les habitants d’un pays sauvage et désolé, auquel les noms de Dardanie, de Dacie, et de Bulgarie