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dans le Surrey ou que la Dove d’Isaac Walton)[1], qui se réunissant de nouveau après qu’ils ont tourbillonné à travers ses rues, sont bordés comme ils descendent (non guéables excepté quand les deux Edouards les traversèrent la veille de Crécy) vers les sables de Saint-Valéry, par des bois de tremble et des bouquets de peupliers[2] dont la grâce et l’allégresse semblent jaillir de chaque magnifique avenue comme l’image de la vie de l’homme juste : « Erit tanquam lignum quod plantatum est secus decursus aquarum. »

Mais la Venise de Picardie ne dut pas seulement son nom à la beauté de ses cours d’eau, mais au fardeau qu’ils portaient. Elle fut une ouvrière, comme la princesse Adriatique, en or et en verre, en pierre, en bois, en ivoire ; elle était habile comme une Égyptienne dans le tissage des fines toiles de lin, et mariait les différentes couleurs dans ses ouvrages d’aiguille avec la délicatesse des filles de Juda. Et de ceux-là, les fruits de ses mains qui la célébraient dans ses propres portes, elle envoyait aussi une part aux nations étrangères et sa renommée se répandait dans tous les pays.

« Un règlement de l’échevinage du 12 avril 1566 montre qu’on fabriquait à cette époque du velours de toutes couleurs pour meubles, des colombettes à grands et petits carreaux, des burailles croisées qu’on expé-

  1. Isaac Walton, célèbre pêcheur de la Dove, né en 1593 à Strafford, mort en 1683, qui a écrit notamment le Parfait pêcheur à la ligne (Londres, 1653). — (Note du Traducteur.)
  2. Déjà, dans Modern Painters, il est question « de la simplicité sereine et de la grâce des peupliers d’Amiens » (Modern Painters, IV, V, 20), Le IVe volume des Modern Painters est de 1855. — (Note du Traducteur.)