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des mœurs et par l’effet de l’opinion publique. Il faudrait aussi se débarrasser de tous les obstacles qui rendent l’émancipation difficile (il n’en existe que bien peu ou point du tout au Brésil), et donner un libre cours aux influences et aux intérêts naturels, qui amènent tant d’occasions, de moyens et de formes d’émancipation, que l’esclavage disparaîtra même sans la faveur de la loi, dès qu’il ne recevra plus d’élémens nouveaux de l’extérieur.

Les races auxquelles appartiennent la plupart des Nègres importés au Brésil, sont les Angolas, les Congos, les Rebolos, les Angicos, les Minas de la côte occidentale d’Afrique, et les Mosambiques de la côte orientale. Ils se distinguent, ainsi que le font voir les têtes de Nègres que nous donnons ici, tant par des tatouages particuliers au visage, que par des différences très-marquées de la physionomie : il en est même qui ont très-peu de ce que l’on regarde ordinairement comme signes caractéristiques de la race africaine. Ces Nègres se distinguent aussi par les variétés de leurs dispositions et de leurs caractères, variétés qui dans l’opinion publique ont établi pour telle ou telle race, telle ou telle réputation plus ou moins bonne ou mauvaise. C’est ainsi, par exemple, que les Minas et les Angolas passent pour les meilleurs esclaves : ils sont doux, faciles à instruire, et il est aisé, au moyen d’un traitement modéré, de se les attacher ; ce sont eux aussi qui par leur activité, leur économie, sont le plus souvent à même de racheter leur liberté. Sous plusieurs rapports les Congos ressemblent aux Angolas : toutefois ils sont plus lourds, et on les emploie de préférence aux gros ouvrages de la campagne. Les Rebolos diffèrent peu de ces deux races, et les langues de toutes trois ont beaucoup d’analogie : cependant les Rebolos sont plus entêtés et plus disposés au désespoir et au découragement que les deux autres espèces. Les Angicos sont plus grands et mieux bâtis ; ils ont dans le visage moins de traits africains ; ils sont plus courageux, plus rusés, et ils aiment davantage la liberté. Il faut les traiter particulièrement bien, si l’on ne veut qu’ils prennent la fuite ou se révoltent. Les Minas se distinguent par trois incisions en demi-cercle, qui du coin de la bouche vont jusqu’à l’oreille. Les Gabanis sont plus sauvages et plus difficiles à instruire que les précédens ; c’est parmi eux que la mortalité est la plus forte, parce qu’ils s’accoutument plus difficilement au travail et à l’esclavage. Du reste ils sont grands, bien faits, leur peau est d’un noir luisant, et les traits de leur visage ont peu le caractère africain. Les Mongolos sont ceux qu’on estime le moins : ils sont pour la plupart petits, faibles, hideux, paresseux et découragés ; leur couleur tire sur le brun : ce sont ceux qu’on achète au plus bas prix.