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300 feux à Barbacena, elle a une grande église située sur une hauteur et plusieurs jolies chapelles. Il y a dans les environs de nombreuses plantations de maïs ; le reste de la contrée est nu et montueux.

Barbacena est élevée de 3570 pieds au-dessus du niveau de la mer ; c’est à peu près la même hauteur que celle des sommets les plus élevés, qui ont paru si escarpés au voyageur venant de la côte. Vues des Campos, au contraire, ces montagnes de Minas n’apparaissent que comme de petites chaînes ou de fortes collines.

À la fin du siècle dernier Barbacena était le siége d’une bande de brigands qui infestaient la route de Rio Janeiro ; plusieurs d’entre eux appartenaient à des familles aisées. Non loin de la facenda Mantiguera est une croix qui indique le lieu où ces malfaiteurs avaient coutume d’attaquer les voyageurs ; ils les entraînaient dans la forêt, et là ils les tuaient, ainsi que tous les êtres vivans qu’ils avaient avec eux, leur laissant ordinairement le choix de leur genre de mort : soit qu’ils voulussent recevoir un coup de couteau dans le cœur, ou se faire ouvrir les veines. Ces désastres durèrent plusieurs années, et souvent des personnes de distinction disparaissaient. Enfin, au lit de la mort, un de ces misérables avoua ses crimes et nomma ses complices : il se fit même transporter au lieu où se commettaient ces forfaits. On y trouva quantité de cadavres et de squelettes d’hommes et d’animaux. Un grand nombre de brigands furent arrêtés et mis à mort ; d’autres furent déportés à Angola. Depuis cette époque, la route de Rio Janeiro à Villa Rica est assez sûre, et il est extrêmement rare que l’on entende dire qu’un voyageur ait été dépouillé ou tué.

Il se rattache un autre souvenir historique à la facenda Borda do Campo. À l’époque de la révolution française les ordres les plus sévères avaient été adressés de la métropole à tous les gouverneurs pour éviter l’arrivée et la circulation d’aucune nouvelle sur ce qui se passait en France : ils devaient surtout empêcher les idées révolutionnaires et républicaines de germer dans ces colonies. Or, à cette époque, que les Brésiliens appellent avec emphase le temps de la méfiance (tempo da inconfidenza), il y avait dans la facenda Borda do Campo de fréquentes conférences entre les principaux habitans du pays, et quoiqu’ils aient été découverts et que plusieurs même aient été arrêtés et punis, il n’y a nul doute que ces réunions, qui dès-lors signalaient la naissance de l’esprit d’indépendance des Brésiliens, surtout des Mineiros, n’aient dans la suite puissamment contribué à l’entretenir et à le répandre.

De Barbacena, à l’ouest, les collines s’étendent dans l’intérieur du pays l’espace