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quartiers les plus laids, au rivage septentrional et dans le voisinage du Saco-do-Alferez, enfin dans les faubourgs de Mata-porcos et de Catumbi, les rues sont fort irrégulières et fort sales. Les demeures ne sont pour la plupart que de misérables huttes jetées çà et là au hasard, ou entassées les unes contre les autres entre les collines et la mer.

Au surplus, le gouvernement actuel travaille avec une grande activité à l’embellissement de la ville par des constructions ; mais ce n’est pas sans rencontrer beaucoup de difficultés : partout il faut faire sauter des rochers pour établir des rues nouvelles, des quais, ou pour donner plus de régularité à ce qui existait. La plus utile et la plus importante des constructions de Rio-Janeiro est sans contredit celle de l’aqueduc de Caryoca, terminée en 1740. Cet aqueduc amène de l’eau excellente du Corcovado, qui est éloigné de plus d’une lieue ; elle parcourt une partie de cette distance sur des arches fort élevées.

Peut-être n’y a-t-il dans l’univers que la contrée de Rio-Janeiro qui offre dans ses paysages des beautés aussi nombreuses et aussi variées, tant sous le rapport de la forme grandiose des montagnes, que pour les contours du rivage. Par la multitude de ses baies et de ses promontoires, il produit une variété infinie de points de vue vers la ville, vers les montagnes, vers la baie et ses îles, enfin vers la haute mer. La richesse et la variété de la végétation ne sont pas moins grandes. Il est resté dans le voisinage immédiat de la ville quelques groupes de grands arbres de ces forêts primitives qui couvraient autrefois les collines et le revers des montagnes. Dans les vallées plus éloignées et sur les flancs de montagnes qui ne sont pas trop escarpées, ces groupes deviennent des bois plus étendus, au-dessus desquels s’élèvent les cimes de rocs décharnés. Plus près du rivage, les collines et les vallées offrent des plantations de café et des maisons de campagne éparses, qu’entourent des bosquets délicieux et fleuris d’arbres et d’arbustes du tropique. Pour achever le tableau de la végétation de ce pays, on y remarque çà et là quelques groupes de palmiers élancés et d’arbres fougères. Les bas-fonds à l’ouest de la ville, du côté du Saco-do-Alferez, sont couverts d’eau au temps du flux et dans la saison des pluies, et le manglier les couvre, de même qu’on le voit occuper l’enfoncement de la baie et l’embouchure des rivières. Du reste, les rivages de la baie de Rio-Janeiro sont à peu près incultes ; il n’y a que quelques plantations éparses en face de la ville, entre Punta-da-Gravada et do Armacem. Là sont sur la plage les villages de Praya-Grande et de San-Domingo, et plus loin le petit village de San-Lorenzo, habité par les descendans de la population primitive du pays.