sein de l’Église comme une chose d’une nécessité reconnue. Jamais cependant on n’a vu d’exemple qu’il ait fallu recourir à la violence pour administrer le baptême à ces esclaves. Ils s’accoutument promptement à regarder cette solennité comme un bienfait ; car les anciens, ceux qui ont déjà été baptisés, traitent les nouveaux venus avec une sorte de mépris et comme des sauvages, jusqu’au moment où ce sacrement les élève jusqu’à eux.
Quoi que l’on puisse dire contre ce genre de christianisme et quelque insuffisant que soit le baptême conféré dans de pareilles circonstances, il demeure toujours certain qu’il y a un rapport direct de la consciencieuse observation des préceptes de l’Église catholique à la bonne conduite des esclaves, à leur valeur morale, à l’humanité des maîtres : avant donc que d’imprudentes clartés viennent leur représenter cette religion comme un assemblage de formes extérieures vides de sens ou comme de vaines superstitions, on aurait droit d’exiger que ces lumières fournissent des garanties très-certaines que non-seulement elles pourront produire à l’avenir de plus salutaires effets, mais encore qu’elles les produiront réellement. Si l’on considère ce que sont les esclaves au Brésil et aux Indes occidentales, et si l’on compare la conduite du clergé dans ces deux colonies, les prétentions du clergé anglican à un plus haut degré de civilisation et de lumières en seront fort compromises. Une vérité reconnue, c’est que les esclaves qui appartiennent à des couvens ou à des corporations ecclésiastiques sont à la fois les plus laborieux, les plus moraux, les mieux nourris et les mieux entretenus. Ce qui les relève encore à leurs propres yeux, c’est qu’ils ont la persuasion qu’ils ne sont pas au service des moines ou des religieux ; ils se disent les serviteurs immédiats des Saints sous l’invocation desquels se trouvent placés les églises et les couvens : ils appartiennent ainsi à S. Benoît, à S. Dominique, etc., ce qui ne contribue pas pour peu de chose à leur faire penser qu’ils sont au-dessus de leurs compagnons d’infortune. Les devoirs de parrain envers le filleul, ayant jeté de profondes racines dans l’opinion publique au moyen des idées religieuses, exercent une salutaire influence sur le sort de l’esclave et lui assurent un ami, un conseil qui écoute toutes ses plaintes ; et qui, s’il ne peut le protéger dans toutes les circonstances, a du moins des consolations pour toutes ses douleurs. Ces devoirs sont tellement reconnus par les mœurs publiques, qu’il est fort rare que le maître serve de parrain à l’esclave : cette qualité apporterait trop de restriction à ses droits et à sa puissance. La position indépendante du clergé dans ces colonies catholiques tourne aussi au profit des esclaves, qui le plus souvent invoquent avec confiance son intervention et ses conseils.
Après ces considérations générales sur l’état des esclaves au Brésil, nous allons entrer