fluer d’une manière favorable sur la condition des esclaves. La liberté qui règne chez les maîtres dans toutes les relations et pour toutes les classes de la société, ne leur est pas moins propice ; elle diminue beaucoup les désagrémens inséparables de la servitude. Enfin, ce qui est d’un plus grand poids dans la balance que les qualités de leurs maîtres, c’est que ceux-ci sont pénétrés des idées les plus religieuses. Il n’y a nul doute que le catholicisme, tel que le pratiquent les Portugais et les Espagnols, ne contribue plus que toute autre chose à rendre l’esclavage supportable autant que peut l’être une condition, aussi opposée à la nature. Ce n’est point ici le lieu d’expliquer pourquoi le christianisme n’a pas eu partout des effets aussi salutaires ? Il suffira de rapporter un fait, c’est que dans les colonies anglaises les ministres du culte anglican ont fait jusqu’à ce jour peu ou même rien du tout pour l’instruction morale et religieuse des esclaves ; et même les efforts de quelques prêtres sectaires, loin d’être favorisés par l’Autorité ou par les colons, ont souvent éprouvé la résistance la plus opiniâtre. Le sort du missionnaire Smith à Demerary sera une tache éternelle dans les annales des colonies anglaises. Cette manière si peu chrétienne d’entendre le christianisme, l’esprit d’aristocratie et le peu de liant que les Anglais apportent dans leurs relations sociales, enfin les spéculations sans fin auxquelles se livre cette nation, rendent plus large et plus profond qu’il ne le serait d’ailleurs le gouffre qui sépare les maîtres des esclaves. Il y a de la part des premiers envers les seconds un mélange d’avarice, de mépris aristocratique des races étrangères, et même d’orgueil religieux : le colon pense que le manque de croyance ou la croyance erronnée de son esclave ne lui donne pas moins que ses vices le droit de l’opprimer et de l’exclure des biens les plus ordinaires de la vie ; il ne daigne pas même réfléchir que lui-même a fait naître ces vices dont il se prévaut, ou du moins qu’il ne fait absolument rien pour les corriger au moyen de la morale et de la religion. Ces remarques ne peuvent paraître sévères qu’à ceux qui ne connaissent pas les débats et les négociations auxquels ont donné lieu, en Angleterre, les refus opiniâtres des colons de faire la moindre chose pour améliorer la condition de leurs esclaves sous les rapports physiques et moraux.
Le colon du Brésil, au contraire, regarde comme son premier devoir d’admettre l’esclave dans la société chrétienne ; s’il le négligeait, rien ne pourrait le soustraire à la flétrissure que lui imprimerait à la fois le clergé et l’opinion publique. La plupart des esclaves sont baptisés sur la côte même de l’Afrique avant leur embarquement, ou le plus tôt qu’il est possible de le faire après leur arrivée au Brésil, et dès qu’ils en ont appris assez de la langue de leurs maîtres pour réciter les principales prières du culte catholique. On ne les consulte pas sur ce point, et l’on regarde leur admission au