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réussirent enfin à s’emparer non-seulement de la province de Pernambuco, mais encore de toutes les provinces voisines qui vers le sud s’étendent jusqu’à Bahia. Les causes qui paralysèrent la courageuse résistance des habitans de Pernambuco, en leur faisant perdre tout le fruit de leurs premiers succès, furent principalement dans les divisions qui s’établirent entre les chefs des Brésiliens ; dans l’incapacité ou dans la trahison du général Bagnolo, qui était napolitain ; enfin, dans la désertion du mulâtre Calabar ; ce fut ce qui contribua le plus à la réussite des Hollandais. Sans doute il est pénible de jeter ainsi le blâme sur les noms de quelques-uns des chefs qui défendaient la liberté du Brésil ; mais quand l’histoire flétrit le nom d’un traître, qui plus tard devint l’objet de la vengeance de ses concitoyens, il est beaucoup d’autres noms qui brillent et brilleront toujours dans les annales du Nouveau-Monde ; leur immortelle réputation est due aux plus nobles sacrifices, à l’héroïsme le plus pur, à la profondeur des vues et à l’habileté de l’exécution. Il est beaucoup d’hommes dont la noble conduite constitue de véritables titres de noblesse à la race noire et à la race cuivrée, et nous citerons de préférence à tous les autres les noms du chef de Nègres Henrique Diaz et du chef indien Cameram.

Alors même que tout paraissait perdu, une grande partie des habitans de Pernambuco refusa de se soumettre aux Hollandais. Ils partirent avec femmes et enfans pour le port voisin de Porto-Calvo ; de là, chassés encore par les Hollandais, ils vinrent à Bahia. Beaucoup d’entre eux, leurs femmes, leurs enfans périrent de faim et de mal-aise dans leurs marches à travers les déserts de Sertaos. Les autres contribuèrent beaucoup à protéger Bahia contre l’attaque du général hollandais Maurice de Nassau.

Vers ce temps (1638) il parut être décidé qu’à l’avenir le Brésil serait partagé entre la Hollande et le Portugal, et d’autant plus qu’on avait vu échouer la dernière tentative de la cour d’Espagne, qui avait envoyé Francisco Mascarenhas à la tête d’une flotte pour sauver Pernambuco. Par une administration sage et vigoureuse Maurice de Nassau chercha à fermer les plaies des provinces qu’il avait conquises, et qu’une guerre de dévastation avait long-temps ravagées. L’activité des Hollandais semblait promettre que bientôt l’on mettrait à profit les riches ressources de cette contrée, et que Pernambuco serait l’une des principales colonies d’une puissance, qui, pour l’importance maritime, était alors une des premières de l’Europe. Un événement, qui à la première apparence semblait devoir favoriser toutes ces vues, contribua cependant à les détruire d’un seul coup. Le 1er Décembre une conjuration, la plus glorieuse peut-être de toutes celles dont l’histoire a retenu le souvenir, délivra le Portugal du Joug de l’Espagne, et mit la maison de Bragance sur le trône. Il parais-