Page:Rugendas - Voyage pittoresque dans le Brésil, fascicule 16, trad Golbéry, 1827.djvu/3

Cette page a été validée par deux contributeurs.


VOYAGE PITTORESQUE

DANS LE BRÉSIL.


Séparateur


EUROPÉENS À BAHIA ET À PERNAMBUCO.


Il y a beaucoup d’analogie entre l’état social des habitans de Bahia et les mœurs, les usages et le caractère de Pernambuco : les uns et les autres sont séparés par des différences bien tranchées des habitans de Rio-Janeiro et des provinces méridionales. Depuis l’époque qui ouvrit le Brésil au commerce européen, et surtout au commerce anglais, Bahia et Pernambuco ont toujours vu s’accroître l’influence des besoins, des jouissances, des idées et des connaissances de l’ancien monde ; néanmoins les Brésiliens du nord se sont, à ce qu’il semble, moins attachés aux dehors brillans de la civilisation européenne, qu’à ce qu’elle offre de sérieux, d’industriel, de scientifique. Ces deux villes ont moins de splendeur que la résidence de la cour impériale ; mais on y jouit de l’aspect d’une aisance plus générale, d’une activité plus libre. Cette observation s’applique surtout aux classes moyennes et aux classes inférieures : le nombre des petits propriétaires et des ouvriers libres y est plus grand que dans les provinces méridionales ; le peuple y est moins turbulent, moins débauché, moins efféminé qu’à Rio-Janeiro. L’homme de la basse classe, quelle que soit sa couleur, affecte une certaine fierté, une sorte d’énergie, qui le conduit souvent à des violences, à des outrages, et à se faire vengeance à lui-même.

Les Brésiliens septentrionaux se distinguent par leurs connaissances maritimes, et l’on sait qu’une grande partie de la population de ses provinces se nourrit par la pêche de la baleine. Les radeaux dont les pêcheurs se servent sur la côte, sont pour les jeunes gens l’occasion de s’accoutumer de bonne heure à la mer et à ses périls. Ces radeaux, appelés Jancadas, se composent de cinq à six pièces d’un bois léger, assemblées d’une manière toute particulière ; ils sont surmontés d’une voile latine ; le pilote occupe un siège étroit ; il a près de lui une pièce de bois en forme de fourche pour y suspendre quelques provisions et quelques vases. C’est sur ces frêles embarca-