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tigable activité, ne s’abandonne point à des conseillers ignorans ou malveillans, s’il ne sépare point ses intérêts de ceux des Brésiliens, s’il ne les sacrifie point à l’influence étrangère, s’il observe le progrès de l’opinion publique, s’il honore ses représentans et s’il les écoute, son règne, lors même qu’il ne serait pas en son pouvoir de satisfaire tous les vœux, marquera l’une des plus mémorables et même des plus glorieuses époques de l’histoire du Nouveau-Monde.

Il est un objet qui, malgré l’importance extraordinaire dont il peut être pour le Brésil, n’est pas traité par le gouvernement avec toute l’attention qu’il mérite : c’est la colonisation du pays par des Européens. Les avantages qui en résulteraient pour l’Etat sont trop évidens pour qu’il soit besoin de les énumérer. Plus que tout autre moyen cette colonisation accélérerait la civilisation et la dirigerait. Nous n’indiquerons qu’une des faces de la question, parce qu’on ne paraît pas y avoir fait assez d’attention : c’est l’influence que l’accroissement de la population des blancs dans le Brésil, et en général dans le Nouveau-Monde, exercera nécessairement sur l’état des noirs et des esclaves. Evidemment cette influence aurait, un jour, pour résultat l’abolition de l’esclavage, sans qu’il y eût à redouter ni secousse ni danger. En effet, si la prépondérance du nombre appartenait aux blancs, elle diminuerait par là-même les dangers de l’émancipation des noirs, dangers qu’au surplus l’on a peut-être de beaucoup exagérés. D’ailleurs la concurrence du travail des hommes libres enchérit toujours le travail des esclaves, et diminue par conséquent les avantages du système de l’esclavage de manière à en rendre l’abolition désirable pour les maîtres eux-mêmes. Malheureusement le mauvais succès de tous les essais de colonisation a créé un préjugé très-défavorable à toute entreprise semblable, non-seulement dans l’esprit du gouvernement brésilien, mais encore dans le public européen, et surtout en Allemagne. Qu’il nous soit donc permis d’exposer rapidement les causes de ce peu de succès, afin d’assurer aux entreprises futures une issue plus favorable.

Il n’est pas étonnant que ceux qui ont été victimes de ces entreprises cherchent les causes de leur mésaventure partout, excepté dans leurs propres défauts ; il n’est pas étonnant non plus que le public se soit laissé égarer par leurs plaintes au point de concevoir des idées entièrement fausses. Nous sommes sûr néanmoins de l’assentiment de tous les connaisseurs et de toutes les personnes impartiales, quand nous dirons que ces hommes déçus dans leurs espérances ne font qu’expier leurs propres vices et leurs extravagances, et que les reproches qu’on a faits au gouvernement du Brésil, sont absolument dénués de fondement. Ce gouvernement est consciencieux observateur des engagemens qu’il prend dans les lettres émanées de lui et reconnues