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de chef commun ni de centre de réunion, il ne faut pas y penser, et il serait tout-à-fait inutile de négocier avec des chefs isolés, personne parmi eux n’ayant ni le désir ni le pouvoir d’observer les conventions : d’ailleurs ces diverses troupes sont trop petites pour que leur amitié puisse être de quelque importance. La paix existe aujourd’hui il est vrai, entre les colons et la plupart des tribus indiennes ; mais à chaque instant un hasard peut venir la troubler. Dans les derniers temps les hostilités contre les Botocudos furent les plus longues et les plus opiniâtres ; elles durent encore sur quelques points. Ce qui démontre combien il y a peu d’unité entre ces peuples, c’est que les Botocudos du Rio doce sont en guerre avec les colons, tandis que ceux du Rio de Belmonte vivent avec eux sur un pied d’amitié. Les Puris ont aussi commis des hostilités dans ces derniers temps. Du reste, ils n’ont pas, à proprement parler, de dessein ni de vues politiques ; il n’y a parmi eux qu’un petit nombre d’hommes qui savent comme une chose vague et générale que leurs adversaires forment un tout, un état sous un chef commun. Ils surprennent des plantations isolées, soit pour les piller, soit pour venger quelque offense. Dans ces occasions ils tuent, sans distinction, tous ceux qui leur tombent sous la main, et détruisent tout ce qu’ils ne consomment ou n’emportent pas. Il semble, au surplus, qu’ils attachent peu de prix au mobilier des colons : si l’on en excepte les haches et les couteaux, on ne trouve chez eux rien qui puisse être considéré comme provenant du butin fait dans ces pillages.

Pour toute mesure de sûreté contre ces attaques, le gouvernement se borne à placer dans les pays les plus exposés, et dans les lieux où la route traverse des forêts, ce qu’on appelle des Quartales ou Presidios ; ce sont des postes de quelques soldats commandés par un sous-officier ou par un porte-drapeau. Le plus souvent ces postes sont logés dans de misérables huttes ; leurs fusils sont en très-mauvais état : le gibao de armas est leur principale défense : c’est une camisole de cuir, rembourrée de laine, qui descend jusqu’aux genoux, qui couvre le corps, le cou, les cuisses et le haut des bras, et met ces parties à l’abri des traits des Indiens. Chaque poste possède un ou plusieurs de ces gibaos. Quelquefois ces soldats ont avec eux des Indiens civilisés, et les gros chiens ne leur manquent jamais. On met ordinairement plusieurs de ces postes sous l’autorité d’un capitaine ou d’un colonel. Quand les Indiens ont commis des hostilités sur quelque point, ou bien, comme cela arrive parfois, quand ils ont surpris un poste, on fait, pour les punir et les effrayer, ce que l’on appelle un entrada. On réunit quelques postes ; le capitaine du district se met à leur tête ; on recherche les Indiens, et on les attaque partout où on les trouve ;