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bosquets (taboleiros) : ils s’éclaircissent ; les grands arbres s’isolent, et des collines riches de gazons et de fleurs se présentent à la vue. Cependant on ne pourrait les appeler du nom de prairies, et leur caractère est tout différent de celui des steppes de l’ancien monde. Il est rare que celles des campos geraes soient étendues ; le plus souvent on n’aperçoit que les collines dont on est immédiatement entouré ; et tandis que dans les steppes de l’Asie d’immenses régions appartiennent à quelques familles de végétaux, les campos geraes conservent la variété des couleurs et des formes que l’on remarque dans les forêts primitives, ce qui tient lieu de l’agréable verdure des prairies d’Europe. Entre leurs herbes fines, pâles et sèches, de nombreuses espèces de rubiacées et de malpighies couvrent le sol de leurs fleurs variées, tandis que des arbres à fougères s’élèvent parmi les liliacées : les congonhas et les acajous nains forment de petits bois. Le sol est d’une argile dure, couverte de débris de quarz. Des roches parfois traversent cette mer de collines, sous la forme de tours, de murailles et de créneaux ; et, quand les rayons du soleil frappent leurs faces micacées, ces roches brillent d’un éclat superbe : elles arrêtent le cours des fleuves, et les forcent souvent à s’échapper de chute en chute, ou de changer en étangs le fond des vallées.

Le règne animal prend ici un caractère plus calme, et qui fait contraste avec la variété et le mouvement des espèces dans les forêts vierges. De petites troupes d’autruches courent dans les broussailles, tandis que des oiseaux du genre de la poule y cherchent leur nourriture. Sur les cimes se posent le toucan aux ailes variées, le tanagran à couleur rouge, et le cahoa, qui guette les serpens lorsqu’ils viendront dérouler leurs anneaux au soleil. Ce n’est que rarement que des troupes de perroquets, arrivant des forêts ou retournant vers elles, interrompent de leurs cris désagréables le silence des collines.

Le voyageur ne doit s’attendre à retrouver des hommes et des ouvrages humains qu’aux extrémités de ces campos : là sont quelques demeures éparses et quelques plantations, ou bien les cabanes de pâtres qui conduisent d’innombrables troupeaux de vaches et de chevaux. De temps à autre on rencontre de longues caravanes de mulets, qui entretiennent le commerce entre les provinces des pâturages et des mines et celles de la côte. Dans la province de Minas-Geraes et dans une partie de celle de Goyaz les excavations et les terrasses produites par l’exploitation de l’or, ajoutent une particularité de plus au caractère général du pays. On voit sur la cinquième planche une partie des campos de la province de Minas-Geraes. Le Rio-das-Velhas arrose la contrée, et dans le lointain s’élève la Serra-Coral-de-El-Rey.

Il faut accorder une mention particulière aux marais et aux lacs, qui se trouvent