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cond chasseur, car il est bon d’être deux à cette chasse, sortît doucement de la loge, et, contournant de loin les oiseaux, s’approchât courbé, et comme une vache qui paît, pour les pousser doucement vers le filet, où il les forceroit à propos de se précipiter, en leur jetant son chapeau. On brise la tête des pluviers pris ; on nettoie la place des plumes qui peuvent y être restées, et l’on retend.

Au lieu de filets tendus en rets saillans, d’autres chasseurs se servent de nappes tendues en pantaine ou rideau, au bord d’un champ où l’on a eu soin de s’assurer, la veille, que couchoient les pluviers. Alors, au moment de leur rassemblement, un grand nombre de chasseurs entourent le champ et se couchent à plate terre ; lorsque les cris d’appel se font entendre, ils laissent les oiseaux se réunir, puis se levant tous à la fois, et les poussant à grands cris et en jetant des bâtons vers le filet, ils y font une bonne capture. Si l’on n’est pas assez de monde pour exécuter cette chasse de cette manière, on se sert de l’appeau à pluvier, et l’on imite le cri d’appel de derrière le filet, vers lequel ce cri les attire.

Si on veut les tirer au fusil, on se sert d’appeaux, d’entes et d’appelans, comme dans les chasses précédentes. On dispose ses machines dans un pré ou lieu jugé convenable ; on fait jouer l’appeau et l’on attire les pluviers. Les chasseurs ont soin de se munir de huttes ambulantes, ou du moins de se couvrir de feuillages. Lorsqu’ils voient les pluviers abattus, deux des chasseurs les mieux placés les contournent et les approchent, et lorsqu’ils ont fait feu sur la bande, les autres les secondent en tirant sur ceux qui s’échappent et qui passent à leur portée. Il est une autre manière de les chasser, qui convient aux pays de vastes plaines. Il faut, pour cela, se réunir en très-grand nombre et cerner les pluviers de loin. Cette première fois, il est presque certain qu’on ne les approchera pas ; mais on remarque l’endroit où ils s’abattent, qu’on cerne encore, et ainsi de suite, jusqu’à ce qu’on les ait lassés. Cette espèce de battue dure quelquefois deux heures ; mais, au bout de ce temps, et souvent dans un plus court délai, on parvient à les joindre à bonne portée.

On les approche aussi avec la Vache Artificiele. (Voyez ce mot.) Enfin, on les prend la nuit au traîneau, ou même on les tire à coups de fusil, en se servant de feu. (Voyez Perdrix.) La vue de la lumière force les pluviers à se rassembler et à se blottir ; mais il faut observer un grand silence. De quelque manière qu’on les chasse, les époques de leur arrivée et de leur départ sont toujours les plus favorables.

Les guignards sont une sorte de petits pluviers de la grosseur d’un merle ; ils ont la tête bigarrée de noir, de gris et de blanc, le dos d’un gris brun lustré de vert, la poitrine d’un gris ondé, le ventre noirâtre, blanc vers la queue, le bec et les pieds noirs. Ils sont très-communs sur plusieurs points de la France, notamment vers Chartres, aux environs d’Amiens, de Falaise, etc. En avril et mai, ils paroissent voyager vers le nord, et en revenir au midi après les chaleurs. Ils fréquentent les guérets, les pelouses et les friches, se retirent dans les marais, volent par bandes de quinze, vingt et trente, plus ou moins, et se laissent assez approcher. Lorsqu’on en tue un, on le laisse sur la place, et les autres volent long-temps autour de lui, sur-tout si on contrefait leur cri avec un petit sifflet de terre cuite ; cette habitude donne la facilité de les tuer. Le guignard est un très-bon gibier. Il mange, comme le pluvier, les scarabées, les vers de terre, les limaçons, etc. ; mais il paroît plutôt un