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des chandelles, on se rend au bois, et, tenant la chandelle allumée entre les deux doigts du milieu de sa main gauche, recouvrant la lumière de la paume de sa main droite, on forme une sorte de réverbère dont on dirige la lumière en haut sous les branches d’arbres. Lorsqu’on y apperçoit à sa portée un oiseau endormi, on saisit prestement sa batte ou battoir, et on l’assomme d’un coup vivement lancé. Outre que cette méthode demande de l’adresse, elle a l’inconvénient de meurtrir singulièrement les oiseaux. L’auteur des Ruses innocentes conseille de substituer à cette assommante palette, un bâton percé à son bout d’un trou d’un pouce environ de profondeur : on enfonce dans ce trou un brin de gluau dont, dans ce cas, on a pris avec soi une certaine quantité. Lorsqu’à l’aide de sa lumière on découvre un oiseau endormi, on lui approche doucement le gluau sous le ventre, et l’oiseau se sentant toucher, se réveille, étend les ailes pour partir, et ne manque guères, dit l’auteur cité, de s’engluer.

On se sert, avec plus de succès encore, de l’arbret portatif dont j’ai déjà parlé à l’article Arbret : c’est une branche, ordinairement d’ormeau, dont les petits bouts effeuillés et conservés de manière à bien former au bout de la branche une sorte d’éventail, sont enduits d’une quantité suffisante de glu au moment de la chasse. Avec cet arbret, quelques personnes se rendent, la nuit, autour des haies et bouquets de bois. L’un des chasseurs est armé d’une torche de paille, ou mieux de filasse poissée : on allume cette torche sur les lieux ; un homme bat les buissons et broussailles ; les oiseaux, par un premier mouvement, fuient vers la lumière près de laquelle se tient l’oiseleur qui, d’un tour de main, en enveloppe plusieurs dans la partie rameuse et engluée de son arbret.

Ces chasses deviennent bien plus destructives si l’on y porte les filets contre-mailles, que j’ai décrits sous le nom d’araignée et rafle, à l’article Grive. Ces filets, gouvernés avec les précautions que j’ai indiquées en cet endroit, ramassent d’un seul coup plusieurs douzaines d’oisillons de toutes sortes ; et il n’est pas nécessaire de s’arrêter pour les premiers qui s’y prennent ; ils sont tellement embarrassés dans la toile, qu’on a le temps de battre plusieurs buissons avant qu’aucun des captifs puissent venir à bout de se dégager. Les nuits calmes, sombres et froides sont les meilleures pour ces chasses. S’il souffle un peu de vent, ce n’est pas une raison pour abandonner la partie, il suffit seulement de se diriger, en se souvenant que les oiseaux dorment, comme je l’ai déjà dit plusieurs fois, la tête dans le vent. (S.)


PINTADE. Cette poule, originaire des contrées brûlantes, a été très-bien décrite à son article, pour la forme et le caractère. À la vérité, Rozier n’en ayant jamais élevé, s’est trouvé forcé de copier ce qui a été dit : mais comment parler sainement des objets qu’on n’a pas vus par soi-même, et qu’on est réduit à s’en rapporter à ceux qui souvent n’en savoient pas davantage ? Ces réflexions me déterminent à présenter quelques observations particulières sur les mœurs et les habitudes de cet oiseau.

La pintade, ainsi nommée à cause de l’agréable disposition de son plumage, est d’origine africaine ; on l’élevoit autrefois en Italie avec des soins recherchés ; elle faisoit, chez les Grecs et les Romains, les délices des tables : mais il semble que l’espèce s’en est perdue en Europe, car on ne la voit plus reparoître qu’au seizième siècle ; ce n’est même que depuis fort peu de temps que la pintade a été admise dans nos basses-cours ordinaires, peut-être à cause de son cri aigu et perçant, qui l’a fait appeler, par Browne, gallus clamosus. Elle est en effet tellement pétulante et