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humidité. On peut prévenir ses ravages, en l’empêchant de naître ; c’est-à-dire en tuant tous les hannetons femelles qui arrivent dans la pépinière, chaque matin, avant qu’elles aient déposée leurs œufs. Lorsqu’ils sont nés, on n’a d’autre moyen de les détruire qu’en faisant de fréquens labours d’été, pendant lesquels on est bien attentif à ramasser ceux que la bêche met au jour. On parvient encore à se débarrasser de quelques uns en semant de la laitue, dont ils aiment la racine de préférence, et en allant les chercher autour, lorsqu’on voit par le fanage de ses feuilles qu’elle est attaquée par eux. Un pépiniériste soigneux fera la même recherche au pied de tous les plants qu’il jugera, au même signe, être attaqués par le ver blanc. Ces moyens sont chacun peu destructifs, mais leur réunion ne laisse pas que de produire de l’effet au bout de l’année. Le ver gris, dont se plaignent aussi quelquefois les pépiniéristes, est la larve ou chenille de plusieurs espèces de noctuelles, chenilles qui se cachent dans la terre pendant le jour, et qui alors rongent le collet de la racine des jeunes plants. On le détruit comme le précédent.

Les escargots et les limaces font quelquefois beaucoup de tort aux semis, en mangeant les cotylédons des jeunes pousses. On s’en débarrasse facilement, en plaçant autour de ces semis des planches ou des paillassons, élevés d’un pouce au dessus du sol, et sous lesquels ces animaux se retirent, chaque matin, pour éviter l’action des rayons du soleil sur leur corps. Ainsi, toutes les fois qu’un pépiniériste se plaint d’eux, c’est qu’il a négligé d’employer cet excellent et facile moyen.

Quant aux mulots et autres animaux du genre des rats, ce n’est qu’avec des pièges de diverses sortes ou des appâts empoisonnés qu’on peut leur faire la guerre avec succès ; mais ils ne nuisent aux pépinières, ainsi que les oiseaux, qu’au moment même des semis, et on peut toujours empêcher qu’ils ne prolongent leurs dégâts, en les inquiétant par une surveillance de tous les instans.

L’établissement des grandes pépinières marchandes et de leurs subdivisions a donné un grand essor au commerce des arbres et arbustes. Aujourd’hui on spécule sur leur formation, comme sur leur produit, c’est-à-dire que des capitalistes ou des jardiniers actifs et industrieux établissent des pépinières dont ils vendent les arbres, par grosses parties, à des marchands qui les placent, avec bénéfice, chez les, propriétaires de fonds de terre. Malheureusement le peu de délicatesse de quelques pépiniéristes, et leur avidité pour le gain, jettent sur ces établissemens, en général, un discrédit qui leur nuit beaucoup. On se plaint trop souvent d’avoir été trompé, pour croire que ce soit toujours l’effet d’un malentendu ou d’une erreur, comme le prétendent ordinairement ceux à qui on en fait le reproche. Il est, dit-on, de ces hommes déhontés, le rebut de la société, qui réunissent dans une même livraison tous les genres de friponneries, c’est-à-dire qu’ils fournissent des arbres crûs dans un terrain trop gras ou trop arrosé, greffés sur des sujets différens de ceux annoncés, portant des fruits autres que ceux demandés, d’une forme vicieuse, d’une nature foible, dont les racines ont été exposées exprès au hâle pour empêcher leur reprise, n’étant pas au nombre indiqué sur la facture, etc., etc. Il est extrêmement difficile d’établir des règles pour reconnoître ces friponneries ; mais le coup d’œil d’un homme exercé se méprend rarement. On y est moins sujet, il est facile de le croire, quand on va soi-même choisir ses arbres dans la pépinière, quand on les fait arracher, compter et emporter en sa présence. C’est donc en ne s’en rapportant qu’à lui-même qu’un amateur peut espérer d’en éviter la plus grande partie.

L’emballage des arbres qu’on destine à être envoyés au loin demande à être soigné, pour empêcher le hâle de dessécher leurs racines, et les accidens de la route de casser leurs branches. Aussi, après les avoir arrachés avec les précautions requises et indiquées plus haut, on entoure leurs racines avec de la mousse, du foin ou de la paille un peu humide, et leurs branches, que l’on violente le moins possible, avec de la paille, sèche ; le tout lié avec de la ficelle en trois ou quatre endroits. On peut encore, lorsqu’ils doivent aller loin, tremper les racines, de toutes les espèces, dans la boue indiquée à l’article des arbres résineux. On ne fait que pendant l’hiver, hors le temps des gelées s’entend, les expéditions de ce genre, qui ont pour objet des arbres fruitiers, des arbres forestiers et des arbres d’agrément qui peuvent leur être assimilés. Mais ceux de ces derniers qui se cultivent en pots peuvent être envoyés en tout temps, sur-tout lorsqu’après les avoir emballés comme ci-dessus, on les met dans une caisse disposée de manière à ce que les pots soient entassés sans aucun jeu aux deux extrémités, et que les tiges soient libres ou peu comprimées au milieu, qui sera en outre percé de quelques trous pour l’entrée de l’air.

Dans l’un et l’autre cas, chaque arbre portera ou son nom écrit sur du parchemin, ou un