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vaux et de chars. « C’est, dit encore M. Bourgelat[1], en établissant des jeux publics, dont les courses de chevaux étoient une des parties principales, que plusieurs anciens peuples de l’antiquité parvinrent à une grande habileté dans l’art de manier le cheval. La victoire y étoit disputée non seulement par des écuyers, mais encore par les personnes les plus recommandables, même par des princes et par des rois.

» Chez les Romains, les courses de chars, les courses de chevaux étoient les spectacles ordinaires du cirque et des jeux funèbres. Ces exercices avoient pour but de donner de l’activité à la jeunesse, de fortifier le corps, de l’assouplir, et de faire prendre l’habitude des grandes fatigues. L’appareil seul de ces jeux excitoit l’émulation et inspiroit le respect. On consignoit dans les registres publics les noms des combattans et ceux de leurs chevaux. De l’or, de l’argent, des habits, des chevaux furent souvent la récompense de la victoire ; et le juge attachoit en même temps, au son bruyant des trompettes, une palme sur la tête des coursiers. Leurs signalemens par noms, pays, poils, étoient gravés sur des tables de marbre, et leurs exploits étoient chantés par les poëtes.

» N’est-ce pas pour perfectionner et pour étendre les différentes branches de commerce que les courses de chevaux ont été instituées chez les Anglais ? Les prix donnés par le roi sont de cent guinées ; ceux qui sont accordés par les villes, ou conséquemment à des souscriptions particulières, sont de cinquante, et ne peuvent être moindres, par acte du parlement. Un même cheval a gagné dans une année, en différens lieux, treize prix, montant à la somme de cinq mille huit cent quarante guinées ; quel appât et quel encouragement ! Le cheval vainqueur est annoncé comme étalon dans les papiers publics, et le prix des sauts est toujours en raison des qualités connues de l’animal et de sa progéniture. Les sauts de l’Éclipse, fameux cheval qui avoit gagné par-tout où il avoit couru, furent d’abord portés à vingt-cinq guinées par chaque jument ; mais ensuite plusieurs de ses poulains coururent, et gagnèrent ; alors le prix de ses sauts monta à cinquante-deux guinées. Il en a été de même de Snap, de Chrysolite, de Mask : les sauts de Mask et Chillaby furent à cent guinées. Ils servirent chacun trente-deux jumens, et valurent à chacun de leurs maîtres trois mille deux cents guinées.

» Un esprit d’ordre et de suite peut perfectionner nos races, au moyen d’une attention à consigner la généalogie et la filiation dans des registres, et à s’opposer constamment à toutes souillures qui pourroient résulter des mésalliances et de mélanges. Ainsi nous parviendrons à obtenir des productions d’un ordre supérieur, et à multiplier l’espèce en proportion de tous nos besoins.

» Les courses offrent d’ailleurs un moyen de juger, par l’épreuve, de la vigueur et des qualités des chevaux, et de choisir, sans se tromper, ceux qui méritent d’être préférés pour le service des cavales. »


CHAPITRE IV.

L’industrie des particuliers, par elle-même, est incapable d’améliorer les chevaux.

Nous avons démontré que l’amélioration ne peut se faire que par de bons choix, et par des alliances bien combinées. Or, ces choix, ces combinaisons exigent la connoissance de la structure intime des parties, l’estimation du degré d’importance dont chacune est

  1. Physique des Haras, de M. Bourgelat.