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nées, ces terrains pourroient être remis en prés.

Si ces dépôts, suites des débordemens, sont par couches minces et de mauvaise qualité, ce qui est infiniment rare, il faut se résoudre à les laisser sur les prés ; ils y rendront le service de détruire la mousse, et l’on peut les bonifier. À cet effet, on y mêlera, le plus tôt qu’il sera possible, avec la herse à dents de fer, une petite quantité de fumier bien consommé. En ameublissant la terre par ce moyen, on procurera à l’herbe qu’elle recouvre la facilité de percer à travers. Enfin, si ces dépôts, ce qui est peu commun, sont épais et de mauvaise qualité, il faut encore se résoudre à les laisser sur les prés. Les cas où ils pourroient être employés d’une manière utile, sont trop rares, pour établir en principe la nécessité de les enlever. Alors ces prés devront être cultivés comme les autres terres auxquelles ils sont devenus semblables : on observera cependant que ces terrains étant plus humides, ils seront susceptibles de fournir des produits plus abondans et de recevoir des cultures plus variées. Il ne faut pas oublier qu’avec de l’eau, du sable, des engrais et un travail assidu, on obtient encore des récoltes fructueuses.

On doit se hâter de couvrir ces nouveaux terrains d’une plante quelconque ; si légère qu’en soit la ressource pour la nourriture des animaux, leur culture est indispensable pour la salubrité de l’air. La végétation n’est jamais plus belle qu’au milieu des émanations délétères que l’homme ne peut respirer sans de grands dangers : les plantes, au contraire, s’en nourrissent, et n’exhalent à leur place que l’air le plus pur.

Les alluvions, en général, sont moins fâcheuses qu’on ne le croit ; il y a même beaucoup de circonstances où les engrais qu’elles fournissent à l’agriculture peuvent les faire regarder comme une de ses plus puissantes ressources.

Les alluvions procurent d’autres avantages. En relevant des sols fangeux et marécageux, elles les consolident et les rendent alors susceptibles de toutes les cultures les plus productives.

Si les alluvions naturelles sont les sources de ces inappréciables avantages, il faut, lorsque la nature nous refuse ce secours, les obtenir par des alluvions artificielles.

Un ruisseau supérieur, une prise d’eau dans une petite rivière, menée, dans des temps d’orage, sur un terrain, en suivant lentement ses pentes, retenue à propos par des batardeaux pour donner à l’eau le temps de déposer son limon, sont les moyens simples que l’observation nous offre pour imiter la nature. (I. M.)


IRRIGATION DES TERRES. Moyens de porter à volonté l’eau sur le terrain. Rozier ayant traité de l’irrigation des jardins, il ne s’agira ici que de celle des terres, et sur-tout des dessèchemens.

Irrigation des terrains desséchés. L’avantage de l’irrigation est immense pour ceux-ci, parce qu’alors on a presque toujours la faculté de varier la culture en prairies ou en céréales, suivant qu’on trouve plus d’avantage à vendre du blé ou des bestiaux.

L’irrigation est nécessaire dans ces sortes de terrains argileux ou bourbeux, parce que, dans les chaleurs, ils se retirent et se fendent en longues crevasses qui ne laissent entr’elles que des masses durcies et intraitables aux instrumens de culture, impénétrables aux plantes et aux influences météoriques.

C’est pour cela que j’ai recommandé, à l’article Dessèchement, de se ménager toujours un réservoir d’eau suffisant, dût-on sacrifier une partie du